mouette

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lamouetterouge@gmail.com

jeudi 19 novembre 2015

A mes élèves

La tuerie de vendredi, le carnage réalisé sur des victimes de hasard ou pas, cela nécessite qu'on y réfléchisse. De nombreuses et longues explications, comme en janvier, sont nécessaires. Le simplisme ne résout rien; je voudrais néanmoins alimenter nos propos par quelques idées simples importantes à retenir. 1/ L'Etat Islamique, DAESH , ce n'est pas l'Islam. C'est une idéologie, se réclamant de l'Islam, et il faut faire cette différence fondamentale. De nombreuses voix musulmanes, tant chez les imams (qui prêchent et conduisent la prière) que chez les fidèles condamnent son action et en particulier celle de vendredi. A tous ceux qui s'interrogent sur ces actions, ne faites pas l'amalgame. Et pensez qu'en Syrie, en Irak , au Liban, en Égypte, en Libye, les premières victimes de ce soi-disant état sont des musulmans et des musulmanes qui voudraient vivre en paix et selon leurs choix. N'accusez donc pas chaque musulman d'être responsable ou complice de ces actes. 2/ La France est une cible depuis qu'elle a décidé de s'engager dans la défense des victimes de cet Etat Islamique. Elle le fait d'abord pour combattre une idéologie totalitaire. Le choix qui est le notre est de savoir si l'on préfère les idées républicaines, les droits des hommes ou la soumission à une idéologie de mort, qui pratique l'esclavage. Ce n'est en aucun cas un combat entre une civilisation chrétienne occidentale et une civilisation musulmane. Présenter le conflit ainsi serait la première victoire de l'Etat Islamique. 3/ L'ennemi de ces terroristes, leur cible, ce n'est pas le bourreau de victimes qu'ils vengeraient, propos entendus pour justifier leurs actions : leur ennemi c'est juste la liberté, la possibilité de faire ses propres choix. Leur ennemi c'est notre devise, : liberté - égalité - fraternité. Car leur système, c'est le totalitarisme. Certains, en cherchant des excuses à ces actes, en cherchant des causes qui pourraient les justifier se trompent. 4/ Que signifie "rester unis"? On entend beaucoup ce slogan aujourd'hui. Il ne signifie aucunement taire nos différences, se soumettre à un silence apeuré... Il signifie continuer à vouloir vivre dans un régime de liberté avec un assentiment commun. Pouvoir être ensemble athée, chrétien, juif, musulman dans un régime d'égalité de droits, la République, notre bien commun.

éradiquer?

"La République éradiquera le terrorisme." (François Hollande au congrès le 16 novembre). Peut-être, mais pas comme ça M. le Président. Ou pas uniquement comme ça ... Comme ça ? à savoir en bombardant les positions de Daesh, en renforçant l'état d'urgence, en armant les policiers municipaux... Comme si on n'avait pas vu que cette folie était née des interventions militaires successives au Moyen Orient. Très bonne tribune d'Edgar Morin dans Le Monde de mardi ICI, excellent article dans Le Monde Diplo également, à ce propos, ICI. Pas facile? Non, pas facile! Il ne suffit pas de croiser les bras, de hausser le menton et de faire péter des bombes. Les Américains le savent très bien. Alors peut-être comme ça aussi, mais pas seulement. Alors comment? Si combattre les effets et le déploiement du terrorisme passe par des dispositions visant ponctuellement à assurer la sécurité de tous, combattre et éradiquer le terrorisme passe par lutter contre les causes qui ont engendré ce monstre : causes extérieures, causes intérieures. A l'extérieur, modifier la politique atlantiste de copinage avec les monarchies pétrolières, revenir à une vraie politique Arabe, œuvrer pour la paix entre Israël et la Palestine. C'est la paix en orient qu'il faut. A l'intérieur,en réinvestissant les quartiers avec des services publics efficaces et des entreprises offrant de l'emploi, du vrai. En luttant pied à pied contre l'obscurantisme rétrograde développés dans certains lieux de cultes musulmans, par l'idéologie salafiste. A ce sujet, excellente tribune d'Abdennour Bidar dans le Figaro (et oui!!!), ICI. Mais en opposant un espoir républicain à l'espoir céleste mortifère. La République éradiquera le terrorisme? oui si elle est réellement République, si elle éveille les consciences, la culture, les esprits, et si elle est réellement la "chose de tous". Pour cela, encore faut-il s'offusquer des lieux de non droit,certes, mais pas que! Rétablir le droit, faire vivre les droits, et, pouvoir opposer aux chimères intégristes un vrai rêve républicain. Angélisme? Que nenni! C'est la seule voie.

mardi 17 novembre 2015

Mon drapeau à moi...

J'ai pas mis mon profil facebook en bleu blanc rouge. Non que je ne sois pas sensible aux symboles nationaux, non, mais.. Disons que j'aimerais qu'on sorte des symboles pour aller au sens. Et il y a dans le déferlement du mot France et du drapeau source de malentendus, qui me conduisent à prendre du recul sur la symbolique: je reçois via des "amis" nombre de messages dont l’ambiguïté nationaliste, pour rester poli, m'effraie... Par exemple, j'avoue, je suis très Marseillaise et je ne souhaite pas en changer une parole. Comme hymne à la liberté contre la tyrannie. Pas de problème. La nation est née politiquement à gauche contre l'arbitraire royal en 1789; l'identité nationale, elle, s'est construite progressivement depuis bien plus longtemps et on en trouve les premières manifestations au 13è siècle. Nul ne songe à contester la pertinence de rappeler les valeurs nationales quand il s'agit de rappeler ce que veut dire la nation dans la conception française : c'est à dire une nation ouverte à qui souhaite adhérer à certaines valeurs (liberté, égalité, fraternité). Mais la conception restrictive " bleu-blanc-rouge", la surestimation du pays, de la mère patrie, ce qui fonde le chauvinisme et le nationalisme, c'est évidemment autre chose, et c'est depuis longtemps l'apanage de la droite extrême. C'est un jacobin qui parle, c'est à dire que je considère comme important le rôle de l'Etat dans la construction de la République. Toutefois, en aucun cas il ne faut poser la nation comme un idéal indépassable, ni même faire croire à sa pérennité absolue, avec des formules oiseuses et qui se multiplient telles que : "le peuple de France est ardent, brave etc...." (Hollande au congrès hier). Les pays meurent, leurs frontières changent, les références bougent. Aujourd'hui, sans nul doute, l'appel à la nation est un appel aux valeurs : s'il n'est qu'un message de repli et de crainte, il manquera fondamentalement de pertinence. Si l'identité est évidemment un besoin, elle se niche dans de multiples recoins et non seulement dans les plis du drapeau. Si l'on veut être fidèle à la nation revenons au projet réel. Que n'exhorte-t-on pas les citoyens à s'exprimer et à créer (liberté?) ; à agir pour que chacun puisse avoir sa chance, et à lutter contre les exclusions (égalité?); que ne cherche-t-on à valoriser leur cité, à les inciter à s'observer en tant que membres actifs du groupe social, à leur ouvrir les yeux sur autrui, son voisin (fraternité?). Il faut inviter à repenser la nation à l'aune des nouveaux enjeux politiques plutôt que de faire briller avec une brosse à reluire des symboles abîmés dans une attitude contrite et défaitiste. Être Français ce n'est pas uniquement savoir la Marseillaise en agitant son drapeau bleu -blanc -rouge, mais avoir sur le monde comme il va un regard marqué par des valeurs universelles! Si la nation est notre cadre de vie depuis plus de deux siècles, et pour un temps encore, n'a -t-elle pas besoin d'un sérieux coup de scalpel, qui redonne à chacun "ce désir de vivre ensemble" dont parle Renan et qui fasse de notre héritage commun non une pièce de musée que l'on bichonne pour être fidèle à papa-maman, mais un patrimoine vivant? Assumant les erreurs d'un pays, ce que Mitterrand n'a jamais su faire par exemple, regardant non les effets bénéfiques de la colonisation pour s'autojustifier mais, regardant devant, s'attachant à savoir comment penser les rapports au Sud, comment envisager les problèmes écologiques majeurs, les aspirations collectives et individuelles. Bref, je ne possèderai pas de drapeau mais j'aurai toujours en tête les Révolutionnaires de 1789 et 1793 pour penser les révolutions à venir, abattre les nouveaux arbitraires et les nouvelles tyrannies (suivez mon regard), libérer les consciences, en un mot être cohérent avec le projet national qui est un projet révolutionnaire et non un projet d'enfermement Mon drapeau à moi alors qu'est-ce? Il flotte au vent marin, rouge évidemment, sans autres frontières que celles de nos consciences . Et j'entends la voix du grand Gilles Vigneault chanter: "Mon pays ce n'est pas un pays/ ... / de ce grand pays solitaire je crie avant que de me taire à tous les hommes de la terre : "ma maison c'est votre maison"/.../ mon pays ce n'est pas un pays, c'est l'envers d'un pays, qui n'était ni pays ni patrie..."

samedi 14 novembre 2015

Terrorisme et fascisme

Les attentats dramatiques survenus cette nuit à Paris inspirent plusieurs réflexions. 1/ On est passé de l'attentat "ciblé" de janvier (pour illégitimes qu'elles soient, les victimes des attentats de janvier étaient ciblées comme journalistes , Juifs, Policiers.... ceci n'enlève rien à l'horreur et à l'absolue des actes commis) à l'attentat au hasard, ciblant tout le monde au seul motif qu'il est parisien. Que la victime soit française, étrangère, de confession musulmane ou chrétienne ou d'aucune confession, enfant ou vieux, les terroristes n'en ont rien à foutre. La cible c'est Paris en tant que Paris c'est la France. Ce terrorisme aveugle si lâche, décrédibilise les motivations des auteurs. Ils prouvent seulement que la vie n'a pas de valeur pour eux. Qu'autrui leur est un ennemi : c'est l'acte d'un système totalitaire qui a prise sur les individus qui le défendent : fascisme. 2/ Les réactions politiques sont également révélatrices. Du consensus général pour ne pas polémiquer dans l'immédiat en tous cas, attitude qui caractérise en gros la majorité des partis républicains (dans les médias, silence assourdissant de la vraie gauche tout de même, en tous cas dans ce que j'ai lu... ALors, je vérifie et je vois une belle phrase de Mélenchon. : "Qu’il est douloureux, ce froid qui monte dans les os quand on vit des moments comme celui-ci dans Paris, sachant la souffrance des autres, retenus en otages et sentant la mort rôder, blessés transis, familles des morts sidérées et déchirées. De là où nous sommes chacun, nous leur tenons la main. Sur les lampions de la fête, dans les bars et les lieux de gaieté vidés, une bise d’angoisse passe. Je vois sur mon écran de télé ce que les navettes de voitures à gyrophares en bas de ma rue me font deviner. Nos gens armés courent à l’assaut des assassins. Eux s’exposent face à des criminels qui, de leur côté, ne s’attaquent qu’à des malheureux sans défense pris par surprise. Cette lâcheté dit toute l’identité des abrutis sanglants qui sont à l’œuvre du côté des meurtriers. Le cœur saigne avec celui de malheureux exposés à l’hyper-violence de cette nuit. À cette heure, toute querelle s’interrompt. Je forme le vœu que nul ne s’abandonne à la vindicte et conserve sa capacité de discernement. Je forme le vœu que nos responsables gouvernementaux aient tous les moyens d’agir comme ils le souhaitent. Et que nous soyons tous capables de résister à la haine et à la peur que les assassins veulent incruster en nous".); De ce consensus donc, une parole tranche. Celle des suppôts du FN et affiliés (De Villiers par exemple) qui utilisent les événements pour parader et prétendre démontrer qu'ils ont la solution et l'annoncent depuis longtemps; Le sang n'est même pas sec, les victimes pas encore dénombrées, que ces sous chefs de partis (Alliot pour la palme d'or) rivalisent de dégueulasserie : charognards. Ces vautours de la politique qui, peut-être, remporteront des élections sur fond de peur voire de terreur renouent là avec tout ce qui leur sert de modèle idéologique : le fascisme. Cette collusion objective des fascismes est terrible à voir. Elle ne surprend personne. 3/ L'état d'urgence décrété par Hollande : que faire d'autre, en la circonstance présente? Il y a objectivement urgence. Toutefois, la crainte est forte que cet impératif de sécurité dans l'exercice de ses libertés (aller au bar , aller au concert, aller au stade, se déplacer dans la rue) n'aboutisse une fois de plus à la restriction abusive de droits. Le terrorisme est le prétexte imparable pour restreindre l'état de droit et les hommes prisonniers abusivement durant plus de 10 ans à Guantanamo en témoignent. Peut-on faire confiance à ce qu'il reste d'humanisme de gauche à nos gouvernants pour croire qu'ils n'abuseront pas de cet état? Lorsqu'on voit l'acharnement à l’œuvre dans l'affaire Coupat on peut en douter... le NPA lui, demande la levée de cet état d'urgence et refuse l'union nationale. Certes...Mais je ne vois pas ce qu'il était possible de faire d'autre... 4/ Afin de ne pas sombrer dans le chaos et la peur, la société française doit regarder ce qui l'abîme : crise politique, crise sociale, crise économique, crise scolaire. Seule l'éducation peut être une porte de sortie : éducation à l'esprit critique, éducation émancipatrice, soif de savoirs, soif de compréhension du monde, interrogation du fait religieux et des religions dans ce qu'elles ont de beau, de laid, interrogation de la notion même de croyance... Face à ces actes et à leurs conséquences, il nous faut donc ne pas sombrer d'un fascisme à un autre, comme de Charybde en Scylla, et de crier vent debout, la si belle devise du pays, pour que d'un étendard elle devienne une réalité : LIBERTÉ - ÉGALITÉ - FRATERNITÉ!